Suite aux mensonges de la police dans la presse (qui a, depuis, menti sur notre dernière manifestation aussi), suite à l’inaction des autorités communales face à l’extrême droite et suite à la criminalisation du mouvement antifasciste liégeois, nous avions envoyé cette série de questions précises à la commune le 3 juin.
Pour l’instant nous n’avons pas reçu de réponses à ces questions.
Bonjour,
Une motion « Liège, Ville Antifasciste » a été adoptée il y a un an et la Ville de Liège se félicite depuis de nombreuses années d’être signataire de la charte « Liège contre le racisme ». Cependant, plusieurs évènements récents questionnent une nouvelle fois la volonté réelle de la Ville à lutter contre le racisme et l’extrême droite, en particulier en cette période électorale et de recrudescence de ces phénomènes.
Si le Front Antifasciste de Liège est régulièrement instrumentalisé par les autorités, entre autre comme épouvantail pour faire interdire les rassemblements d’extrême droite sous couvert de risque de « troubles à l’ordre public » ou pour justifier des dispositifs policiers disproportionnés, il est aussi critiqué pour ses méthodes d’actions directes qui ne s’attaqueraient pas à ces phénomènes de la bonne manière. Nous sommes donc amené.es à vous poser la même question qu’en octobre 2020 : Que fait la Ville de Liège contre les extrêmes droites et le racisme ? Ne nous parlez donc pas d’éducation ou d’événements culturels, qui ont toute leur importance, le Front Antifasciste en organise et y participe régulièrement malgré ses modestes moyens, mais bien de ce que vous faites face aux types de cas très précis listés ci-dessous.
1) Agressions racistes
Une agression raciste menée par 5 hommes appelant à soutenir « Chez Nous » a eu lieu ce 11 mai dans le centre-ville, un samedi soir. Ils ont notamment uriné sur le magasin des victimes, les ont insultées et intimidées (« tu vas faire quoi sale négresse ?« ). Ils ont aussi frappé 3 hommes noirs qui leur demandaient d’arrêter mais pas les autres personnes, blanches, qui essayaient également de leur faire arrêter leur agression. Malgré de nombreux appels téléphoniques, la police a mis plus de 40 minutes pour arriver sur les lieux. Sur place, malgré la gravité des faits, les agresseurs racistes ont simplement été interpellés puis relâchés avec un simple avertissement. Un traitement très différent de celui réservé aux antifascistes (voir plus bas). Comment expliquer la différence de traitement entre ces deux événements ?
En cas de victoire, même limitée, de l’extrême droite lors des élections de juin et d’octobre, les liégeois.es encourent un risque accru d’agressions à caractère politique. Encore ce dimanche, un homme s’en est pris à un événement associatif en se saisissant d’un baffle pendant le discours d’une personne sans papier et en insultant ses soutiens avec les mots suivants : « Ferme ta gueule, casse-toi avec tes nègres« .
Question : Comment la Ville de Liège compte-t-elle agir face à ce type de situations (agressions racistes) ?
2) Affichages de banderoles : raciste et dangereux
Depuis plusieurs semaines, le parti d’extrême droite « Chez Nous » multiplie les actions coups de poings pour faire gagner en visibilité leurs discours haineux et leur liste électorale. Presque tous les jours, ces derniers vont se poster dans des endroits très fréquentés avec leurs banderoles xénophobes, anti-immigrés et islamophobes. En plus du rond-point Avenue de l’Observatoire ils ont fait des actions similaires sur le petit pont situé près de la rue Hocheporte, sur le parking kiss & drive de la gare des Guillemins, dans le même quartier ainsi qu’à belle-île en utilisant une voiture publicitaire avec micro, et surtout sur les autoroutes (notamment sur celle de Bierset) attirant l’attention des automobilistes avec des signes de la main ou des fumigènes. Ils utilisent un drone pour survoler les autoroutes afin de se filmer. Toutes ces images sont ensuite largement diffusées sur leurs réseaux sociaux. À notre connaissance, aucune de ces actions illégales n’a provoqué la moindre réaction des autorités publiques. Pourtant, nous recevons régulièrement des retours de citoyen.nes ne comprenant pas que de telles pratiques soient permises en période électorale et qui se plaignent de l’absence de réactions lorsqu’elles appellent la police.
Une fois encore, cela dénote avec le zèle de la police à faire retirer de domiciles privés certains calicots au contenu politique différent : banderoles de solidarité avec Adil Charrot tué par la police lors d’un contrôle covid, ou plus récemment des drapeaux palestiniens, sous motif de « trouble à l’ordre public ».
Question : Qu’est-ce qui a empêché la police d’intervenir sur ces actions alors que ce petit manège a cours depuis de nombreuses semaines ?
Question : Est-ce que rouler avec son véhicule publicitaire et surtout faire des annonces à l’aide d’une sono en période électorale est légal ? [note : depuis nous savons que le règlement communal ne le permet pas, mais cela a quand même eu lieu y compris quand des citoyen.nes prévenaient la commune en direct]
Question : Pourquoi des banderoles d’extrême droite peuvent-elles être affichées sur une maison mais pas les autres exemples de banderoles et drapeaux cités ci-dessus ?
3) Arrestation d’une vingtaine d’antifascistes
Suite à cette inaction des autorités communales, qui avaient pourtant été interpellées à plusieurs reprises et par différents canaux, des antifascistes se sont rassemblé.es mardi 28 mai devant la maison de l’avocat Marc Léon Levaux – figure bien connue de l’extrême droite, déjà condamné pour dénonciation calomnieuse en 2006 et pour insultes envers des policiers en civil en 2023, inculpé et placé sous mandat d’arrêt puis libéré dans le cadre d’une enquête sur un réseau de prostitution et de traite d’êtres humains (un peu comme l’ancien tenancier du bar de fascistes en Saint Léonard, contre lequel la Ville n’avait rien fait de sérieux non plus).
Depuis plusieurs semaines, des banderoles avec des messages anti-immigration, islamophobes et complotistes trônent sur sa façade bien visible au niveau de la voie ferrée et de l’autoroute. Des militants d’extrême droite se postent au rond-point à proximité depuis une semaine et demie aux heures de pointe avec des banderoles analogues.
Mardi dernier, la présence des antifascistes a permis cette fois que ce petit manège n’ait pas lieu. La police n’est pas venue devant la maison (contrairement à ce qui a été déclaré dans la presse par les portes-parole de la police). C’est plus tard, lors de la rixe au bar TGV rue des Guillemins, initiée par des militants de « Chez Nous », qu’elle est arrivée massivement et en quelques minutes (une quinzaine de véhicules, dont deux du Peloton Anti-Banditisme) en nassant exclusivement les antifascistes.
Comme d’habitude nous avions agi en deux étapes : 1) prévenir l’établissement de leur présence ; 2) en cas de refus des gérants de les faire partir, alors nous restons devant celui-ci en scandant des slogans antifascistes jusqu’à leur départ.
Seul deux militants antifascistes sont rentrés dans le bar (contrairement à ce qui a été déclaré dans la presse par les portes-parole de la police selon laquelle une vingtaine d’individus seraient rentré·es) pour discuter avec le barman. Les autres sont resté.es dehors. Un membre bien connu de « Chez Nous » (Patrice Eggen) est sorti du bar pour porter des coups à des antifascistes, qui ont du se défendre. Le barman et d’autres membres de « Chez Nous » ont alors commencé à lancer des objets sur les antifascistes et une rixe s’en est suivie.
Dans la presse, tout le récit est retourné par les fascistes aidés par la police : les antifascistes seraient rentrés à une vingtaine dans le bar (faux) pour provoquer une bagarre (faux) et auraient déjà commencé plus tôt en lançant des projectiles (oeufs et pavés) sur la façade de Marc Léon Levaux (faux, seuls deux oeufs ont été lancés en direction d’un membre de « Chez Nous » pour le faire partir, sans même le toucher, et pas sur la façade). La police a elle-même diffusé ces mensonges dans la presse, alors qu’il lui aurait suffit de visionner les images des caméras ou l’absence de dégâts sur place. Apparemment, recevoir un coup de fil d’un hurluberlu d’extrême droite qui peut raconter ce qu’il veut suffit à répéter ses propres inepties dans la presse… ainsi qu’à justifier une intervention policière unilatérale. La police a cru qui elle avait envie de croire…
Dès leur arrivée, les policiers n’ont nassé que les antifascistes, ils ont nommés les fascistes « victimes » et ont discuté posément avec les militants de « Chez Nous ». Les antifascistes (dont 4 personnes qui n’étaient même pas encore arrivées sur les lieux mais qui ont été « dénoncées » par « Chez Nous » comme des militant.es) ont été fouillé.es, intimidé.es, embarqué.es, fiché.es, photographié.es, enfermé.es pendant 7h30 et elles sont désormais convoqué.es pour « coups et/ou blessures volontaires ». Les fascistes, eux, n’ont eu droit à notre connaissance qu’à un contrôle d’identité et à terminer tranquillement leur verres à leur terrasse. Deux poids, deux mesures.
Question : La police peut-elle se baser exclusivement sur la version mensongère d’un groupe d’extrême droite pour une intervention ?
Question : La police peut-elle relayer des mensonges dans la presse sans être inquiétée ?
Question : Le PAB a-t-il été créé pour intervenir lors de simples bagarres (voire même pour de simples contrôles ou de simples manifestations comme c’est de plus en plus le cas à Liège) ou a-t-il été créé pour des situations où il y a un danger de mort, d’armes ou de blessé.es graves ?
Question : Si les antifascistes sont des extrémistes en utilisant cette méthode en deux étapes lorsque des fascistes se réunissent dans un bar, quelles sont les méthodes efficaces que la Ville met en place pour empêcher les fascistes de s’organiser et de diffuser leur haine à Liège ?
4) Présence de policiers d’extrême droite dans la police
Dans une interview, l’ancien chef de la police liégeoise Christian Beaupère mettait en avant que sous sa tutelle une vraie surveillance avait été mise en place afin de ne pas laisser des éléments extrémistes intégrer les rangs de la police liégeoise. Pourtant il s’agit d’un secret de polichinelle que des policiers membres de groupes d’extrême droite, ou du moins qui en partagent ouvertement l’idéologie, sont présents dans la police liégeoise. Mardi dernier par exemple, au commissariat, l’un d’eux a vanté les mérites de la manifestation néo-nazie qui avait eu lieu quelques semaines auparavant à Paris, manifestation dénoncée par les médias internationaux et tous.tes les démocrates. Il ne s’agit que d’un exemple, parmi d’autres témoignages et constats de certains écussons d’extrême droite sur des vêtements de policiers liégeois.
Question : Quelles sont les actions concrètes de la Ville de Liège par rapport à la présence de l’extrême droite dans sa police ?
Question : Que pouvons-nous faire contre les policiers d’extrême droite qui nous provoquent ?
5) Agent communal raciste et sympathisant de Chez Nous
Nous avons aussi été interpellé.es par les discours et les agissements d’un des agents communaux qui se dit de la « brigade anti-tag » et l’indique sur son profil facebook : Pascal Thys. Ce dernier a fièrement annoncé sur la page de « Chez Nous » avoir pris l’initiative de nettoyer les tags présents sur la maison de l’avocat et militant d’extrême droite Marc Léon Levaux, mais aussi de l’escalier de bueren où un drapeau palestinien géant avait été peint. Il s’agit donc d’un agent communal qui met en avant un travail particulier pour des raisons politiques et non pour des raisons professionnelles.
Peut-on faire confiance à un tel agent s’il s’agit, par exemple, de retirer des tags à caractère racistes ou islamophobes ? Dans ses nombreux commentaires sur leur page facebook (il est crédité « super fan »), ce dernier ne s’est pas contenté de fanfaronner en invectivant les militant.es antifascistes, ou à appeler à voter « Chez Nous » ou à demander des tracts et des affiches afin de les aider mais il a aussi tenu des propos clairement discriminatoires et racistes. Enfin, jeudi dernier, alors qu’il tractait pour « Chez Nous » dans Liège, il a insulté une jeune femme qui avait refusé son tract et l’a suivie pendant quelques dizaines de mètres.
Question : Un agent communal a-t-il le droit d’effacer des tags sur base de ses préférences politiques ?
Question : Que se passe-t-il lorsqu’un agent communal tient des propos racistes punissables par la loi sur Internet ?
6) Agression et menace au couteau d’un néo-nazi bien connu
Fabian Vervinckt, membre de « Chez Nous », est un néo-nazi liégeois bien connu pour ses faits de violences et comme compagnon de route de longue date de la plupart des formations d’extrême droite wallonnes. Il y a quelques semaines, il a menacé une jeune femme parce qu’elle portait un pull antispéciste et antifasciste. Il a sorti son couteau et lui a dit de retirer son pull. Depuis lors, nous recevons de nombreux témoignages d’autres personnes qui sont menacées par lui régulièrement.
Question : La ville de Liège surveille-t-elle autant les extrémistes de droite que les antifascistes (prétendument) extrémistes ?
En conclusion
Le Front Antifasciste de Liège 2.0 rassemble des personnes et des méthodes diversifiées depuis sa création et nous en sommes fiers.ères. Nous ne militons pas contre le fascisme par plaisir mais bien malheureusement parce que c’est nécessaire. Les autorités se cachent régulièrement derrière la « liberté d’expression » (qui est limitée par la loi) pour ne pas agir. On sent qu’il n’y a pas de véritable volonté politique sur ces phénomènes hormis, pour la galerie, à signer des chartes symboliques non contraignantes et porter de temps à autre un triangle rouge lorsqu’il s’agit d’aller serrer quelques mains. Pire encore, sous couvert que les antifascistes seraient « des extrémistes » du fait de leurs visages parfois recouverts (par besoin de sécurité face à une extrême droite violente) et du fait de leurs actions directes (c’est-à-dire la mise en danger de leurs corps pour bloquer les fascistes), les narratifs politiques, policiers et médiatiques passent de plus en plus leur temps à inverser les rôles et les responsabilités, criminalisant l’antifascisme et victimisant, voire se montrant accommodante, avec l’extrême droite.
Ce n’est pas la première fois que nous interpellons les pouvoirs publics et nous ne pouvons que déplorer qu’aucune de nos interpellations n’aient été suivi de réponses et encore moins d’actes concrets pour endiguer une extrême droite de plus en plus décomplexée.
Une fois encore nous vous posons la question : que compte faire la Ville de Liège contre l’extrême droite et le racisme ?
Salutations Antifascistes